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27/01/2015

Les inconnus importants

Grimaud_COE_Ravel.jpg La forme que j’aime le plus dans la musique classique ce sont les concertos ! Quel que soit l’instrument d’ailleurs. En fait, je crois que seuls deux instruments conducteurs s’imposent : le violon et le piano. Admirables instruments des virtuoses qui engendrent tant d’émotions et si bien accompagné  par tous les musiciens de l’orchestre qui les soutiennent. En tout cas moi, je vois les choses comme ça. J’aime bien également les chœurs composés d’innombrables voix différentes, soutenues par un orchestre.

Il n’y a pas longtemps, à la télévision, confortablement installé j’ai assisté à une très belle émission orchestrale : une pianiste virtuose et un immense orchestre. La caméra explorait tantôt la virtuose et ses mains, tantôt le chef, tantôt des musiciens de l’orchestre. Je me suis surpris à être attentif à ces images. Je me suis pris à les trouver tous égaux en qualité, tous magnifiques, tous parfaits, chacun et son instrument.

De même, le virtuose qui suivit était un prodigieux violoniste. Même réaction. Je suivais avec attention les mouvements de la caméra, admiratif sans restriction aucune, sans jugement de valeur aucun, tous égaux dans la maîtrise de leur instrument, prêts à contribuer avec générosité et rigueur à la réalisation de l’œuvre présentée et surtout chacun indispensable au groupe.

Et subitement, j’ai trouvé triste et injuste que tous ces musiciens soit fondus, des inconnus, noyés dans le magma extraordinaire de ce volume musical où seuls sont extirpés du groupe, le chef d’orchestre, le soliste. Rien pour le flûtiste, le trompettiste, le violoniste, noyés parmi d’autres flûtistes, d’autres trompettistes, d’autres violonistes…. Quel moment d'abnégation doivent-ils vivre, quelle position ingrate, pour qu’après le final, les bravos soient reçus comme autant de miettes.

Effacés mais indispensables. Même pas! Seul leur instrument compte. Ils ne sont pas indispensables en tant que personne, ils sont interchangeables ! Ils viennent uniquement faire leur métier. Beau et difficile métier. Inconnus à l’entrée sur scène, inconnus lorsque la foule se lève et applaudit à tout rompre, inconnus pour les rappels, inconnus le rideau tombé dans la mémoire des spectateurs qui s’en vont dîner. Ils parleront du chef d’orchestre, des solistes qui se sont succédés, de l’orchestre en général, des œuvres jouées par ce bloc musical, l'orchestre vu comme une chose monolithique. Chaque musicien noyé dans l’orchestre restera un inconnu, d’un tout qu’il sert avec talent, maîtrise et honnêteté. Une pierre indispensable de cet édifice précisément construit qu’est une œuvre musicale.

J’étais content ce soir là de les avoir attentivement remarqué. Je leur devais bien cela pour m’avoir comblé de leur talent. Mais, il reste que du soliste nous disons que c’est un artiste, des autres nous disons simplement que ce sont des musiciens. C'est ainsi.

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